Quand la justice pénale nourrit les extrêmes

1. Une justice débordée… ou dépassée ?

Chaque année en France, près de 4,5 millions de plaintes sont enregistrées par les parquets. Environ 540 000 condamnations sont prononcées. Cela signifie que 88 % des victimes n’obtiennent aucune reconnaissance pénale, aucune réparation, aucun soulagement.

Ce chiffre, brut, dit tout. Il ne s’agit pas d’une simple « charge de travail ». Il traduit une déconnexion brutale entre les attentes des citoyens et la réponse des institutions. Et dans ce vide, se glisse un poison : le sentiment d’impunité.

2. Le sentiment d’injustice comme ferment politique

Une démocratie repose sur un contrat tacite : « Si je suis victime, l’État me protège. Si je suis coupable, il me sanctionne équitablement. »

Quand cette promesse n’est plus tenue, l’électeur cherche une alternative. Pas forcément plus juste, mais plus “visible”, plus “rassurante”, plus “punitive”.

C’est ainsi que naît une adhésion croissante à des partis extrémistes, non pas pour leur programme global, mais pour leur discours de fermeté, de rupture, voire de vengeance.

3. Une idéologie judiciaire coupée du réel

Dans certains cercles judiciaires, s’est installée depuis des années une vision désincarnée de la sanction pénale, où :

– la peine devient accessoire,

– la prison est à éviter,

– la protection de la société est relativisée.

Sous couvert d’humanité, cette doctrine a nié la réalité du terrain : récidive fréquente, sentiment d’abandon chez les victimes, agressions gratuites, sentiment d’insécurité.

Quand la justice semble protéger les auteurs plutôt que les victimes, elle se tire une balle dans le pied.

4. La variable migratoire : un sujet interdit mais réel

Il est un fait que dans plusieurs départements, une part importante des délits est commise par des individus issus de l’immigration récente ou mal intégrée.

Ce n’est pas un jugement de valeur, c’est une réalité sociologique.

Mais le refus institutionnel d’en parler, de l’admettre ou même de l’étudier alimente la colère sourde de la population dite “autochtone”.

Lorsque cette colère ne trouve aucun écho dans les discours politiques ou judiciaires, elle se déverse dans les urnes… ailleurs.

5. La magistrature face à ses responsabilités

Les juges ne sont pas responsables de la pauvreté, du chômage ou de l’échec de l’intégration.

Mais ils sont responsables du traitement qu’ils réservent aux victimes, et de la lisibilité de leurs décisions.

Quand une agression est jugée un an plus tard, sans conséquence visible, avec un rappel à la loi ou un sursis, le citoyen ne voit pas de justice. Il voit un système vidé de sens.

Et ce vide, l’extrême droite le remplit avec trois mots : ordre, protection, préférence.

6. Conclusion : la justice n’est pas neutre politiquement

En ne répondant plus efficacement à la détresse des citoyens, la justice participe, involontairement, à la fragmentation du corps social.

Le vote de colère, d’exaspération ou de rupture ne naît pas dans les discours politiques : il naît dans le silence des institutions.

Aujourd’hui, une partie de la magistrature semble avoir oublié que rendre la justice, c’est aussi rendre une société gouvernable.